28 avr. 2007

L'abbaye d'Ardenne

Nous sommes en 1943, près de Authie à l'Abbaye d'Ardenne en Normandie.

Monsieur Jacques Vico est impliqué dans la résistance française, tout comme son père, le maire de Villons-les-Buissons, son frère, sa soeur et sa mère. Il est alors âgé de 21 ans. Les activités de tous les membres de la famille se font pourtant en parallèle, le père et la mère ne sachant même pas que leurs fils sont impliqués dans la résistance.

En décembre 1943, le père de m. Vico est arrêté par les SS. En cachette de leur père, Jacques a caché dans la cave de l'Abbaye des caisses d'armes qui leurs ont été parachutés par les anglais. Le transport des caisses presse puisque les allemands viendront sûrement à l'Abbaye le lendemain pour chercher des preuves de l'implication du père dans la résistance. Jacques, son frère et 10 autres résistants français déplaceront à bras d'hommes et sur plusieurs kilomètres à travers champs les caisses toute la nuit. Ils disparaîtront ensuite, se sachant recherchés.

Le lendemain, douze hommes se présentent chez les Vico accompagnés d'un résistant, ami de Jacques. La soeur de quinze ans de Jacques leur répond. L'homme en charge lui dit qu'ils viennent chercher le matériel de Jacques, mais sa soeur leur dit que Jacques est absent. L'homme insiste alors, mentionnant l'urgence de la situation et disant que Jacques ne pouvait pas quitter, que la résistance lui a ordonné de rester. L'homme sort alors un paquet de cigarettes, et pendant qu'il s'allume une cigarette, le paquet tombe sur le sol. Sa soeur le prend alors, et le tendant à l'homme, elle lui dit: Monsieur, vous ne devriez pas laisser traîner vos cigarettes allemandes.

L'allemand s'emporte et se met à crier. La Gestapo n'a pas réussie à berner la famille Vico. Par contre, les douzes allemands repartiront avec la mère de Jacques qui sera emprisonnée près de Caen jusqu'à la fin mars 1944. Son père sera quant à lui déporté au camp de Mauthausen. Jacques et son frère s'investiront encore plus dans la résistance.

La famille Vico reviendra à l'Abbaye dès la fin de la guerre en Août 1944. En décembre, le petit frère de Jacques découvre un corps enterré dans le jardin. Rien ne marque l'endroit et il est évident qu'on a tenté de camoufler l'endroit. Une fouille plus approfondie permet de découvrir six corps de soldats canadiens. Un mois plus tard, les restes de cinq autres soldats sont découverts un peu plus loin dans le jardin. De retour à la maison, Jacques découvrira quelques mois plus tard une troisième fosse avec un soldat enterré. En mai, deux autres tombes sont trouvées, avec respectivement deux et quatre corps enterrés.

Au total, ce seront dix-neuf corps qui seront trouvés à l'Abbaye d'Ardenne dans le jardin de la famille Vico. Ces soldats appartenaient au North Nova Scotia et aux Fusiliers de Sherbrooke. Ils furent fait prisonnier après l'invasion de Normandie, emmenés à l'Abbaye, interrogés, torturés et assassinés d'une balle derrière la tête.

L'officier en charge des SS stationnés à l'Abbaye d'Ardenne, le Brigadeführer Kurt Meyer, niera durant tout son procès avoir pris connaissance des assassinats. Il sera jugé et condamné à mort, mais la clémence d'un juge militaire et la jurisprudence germano-britannique fera en sorte qu'il soit libéré après quatorze ans d’emprisonnement au Canada, soit en 1954.

Meyer reviendra à l'Abbaye en 1957. Jean-Marie, le frère de Jacques, lui demandera alors pourquoi il n'avouait toujours pas avoir eu connaissance des exécutions. Meyer lui répondit alors qu'il ne pouvait à l'époque vendre ses hommes. Il expliqua avoir envoyé les allemands responsables au front et que le fait qu'ils furent tués le lendemain faisait, pour Meyer, justice aux canadiens assassinés.

Jacques Vico a maintenant 84 ans. Il demeure toujours tout près de l'Abbaye, et il passe ses journées à raconter l'histoire des dix-neufs soldats canadiens qui se sont engagés volontairement pour se battre en France et qui trouvèrent la mort en Normandie. Lorsque nous l'avons quitté aujourd'hui, il nous a regardé et nous a dit: Voilà. Il ne vous reste plus qu'à perpétuer cette histoire et à honorer la mémoire de ces canadiens.

3 commentaires:

Anonyme a dit...

ouffff! notre fibre canadienne serait-elle encore présente dans nos coeurs?
Un commentaire léger là-dessus ma puce: honorer la mémoire de ces Canadiens! C majuscule! hihihi
Bisous!
P.S. Je signerai maintenant avec mon nom de famille...j'oublie tjrs que ya trop de Marie...

Anonyme a dit...

P.S.2. Même en Normandie je te reprendrai là-dessus...avant que Nic le fasse évidemment! -xx-

Anonyme a dit...

ou la maman oeil-de-lynx ;-)

 

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